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13 décembre 2014 6 13 /12 /décembre /2014 11:26

Le 9 juin 1896 est, pour Camille Daniel, un jour à marquer d’une pierre blanche car il épouse la fille unique de Gabrielle Belle et de Jules Favier dans la chapelle de Ronce. Pour célébrer l’événement, ses beaux-parents ont offert l’autel qui est toujours visible dans ce lieu de culte. Par ce geste magnifique, cette famille qui loge à la villa Gabrielle montre son attachement pour Ronce. Ce jour-là, Camille est, sans doute, à cent lieues d’imaginer que suite au décès subit de son beau-père Jules, il va hériter avec son épouse de la Villa Gabrielle et surtout qu’à l’instar de celui-ci, il va devenir le mécène et la cheville ouvrière du développement de la station balnéaire de Ronce-les- Bains.

Camille Daniel

Camille Daniel

Dans le document passionnant qui suit, prêté aimablement par Michel Buraud, on voit tous les obstacles qu’ont dû franchir Camille Daniel et son équipe pour mener à terme de multiples projets.

Sans langue de bois, avec humour et ironie, il fait le bilan de seize ans d’activités au service des Ronçois en ayant le souci d’écrire pour la postérité quelques belles pages de l’histoire de Ronce.

Soixante seize ans plus tard écoutons le avec gourmandise. Certains passages d'une stupéfiante modernité font écho à notre présent.

Camille Daniel,l'infatigable promoteur de Ronce entre les deux guerres

« La saison 1938 est actuellement ouverte et c’est le moment où le S.I. s’adresse à ses membres pour leur cotisation annuelle qui, malgré les dévaluations successives, n’a pas varié depuis 1924. Nous espérons que, comme d’habitude, ils voudront bien remplir cette petite formalité avec le sourire car ils savent que leur argent a été judicieusement employé et qu’ils ont contribué à faire de Ronce, qui n’était rien au début, ce qu’il est actuellement. Mais en dehors de cette catégorie il en existe une autre malheureusement assez nombreuse qui n’a jamais été sollicitée et qui ignore les services qu’a rendus le S.I. et qu’il continue à rendre. Cette catégorie comprend les nouveaux propriétaires et les nouveaux commerçants, parfaitement excusables d’ailleurs. Nous les prions de vouloir bien lire le discours prononcé par le Président du S.I. à la réunion générale de 1937 et nous sommes certains que la lecture de ce document les éclairera suffisamment pour que d’eux-mêmes ils sollicitent leur adhésion au S.I. qui se fera un plaisir de les compter parmi ses nouveaux membres. »

Mesdames, Messieurs,

« C’est pour la 16ième fois que j’ai l’honneur de présider aujourd’hui la réunion générale du Syndicat d’Initiatives. Sa fondation date en effet du 23 avril 1921. Le temps qui travaille pour Ronce-les-Bains, travaille aussi, mais en sens inverse, pour mes collaborateurs et moi. Nous disparaîtrons donc tous dans un temps plus ou moins rapproché et il serait peut-être difficile à ce moment-là de pouvoir apprécier exactement le rôle joué par le Syndicat d’Initiatives, dans le développement de la station. Voilà pourquoi je veux vous parler aujourd’hui un peu plus longuement en toute franchise et avec le seul souci d’être le plus précis possible dans l’exposé des faits dont je vais vous entretenir.

Si par obligation ou même par simple curiosité vous alliez à la Mairie de La Tremblade consulter le cadastre, vous seriez très étonnés de constater que Ronce-les-Bains, n’y figure que sous la forme d’une grande feuille jaune indiquant un terrain sablonneux sans route ni construction. Ce plan cadastral porte la date de 1815.

Mais si maintenant vous jetiez un coup d’œil sur le nouveau plan qui vient à peine d’être achevé, vous seriez très étonnés d’y voir figurer une ville avec ses avenues, ses places et 50 constructions.

Je n’ai pas la prétention de dire que c’est là l’œuvre exclusive du Syndicat d’Initiatives car bien avant lui les Perraudeau de Beaufief, les Brochard, Baillot d’Estivaux, Favier Belle, Sanchez et quelques autres, avaient pressenti l’avenir et fait de très louables efforts pour développer ce coin de la côte si privilégiée par son exceptionnelle situation. Malheureusement leur succès fut relatif et en 1921 50 à 60 chalets à peine, ouverts seulement pendant la saison, composaient toute l’agglomération. Ronce était menacé de disparaître comme autrefois son aïeule, la ville d’Anchoine dont il occupe précisément la place.

Le premier Syndicat d'initiatives

Le premier Syndicat d'initiatives

Le Syndicat d'initiatives bâti sur une parcelle de la Place Brochard

Le Syndicat d'initiatives bâti sur une parcelle de la Place Brochard

Le Syndicat d’initiatives. Sa création.

C’est à ce moment critique qu’apparut le Syndicat d’Initiatives. Le 10 juillet 1914 dans une réunion tenue au Grand-Chalet, un certain nombre de personnes dont j’eus l’honneur de faire partie, décidèrent de mettre en commun leurs efforts, pour essayer de galvaniser cette malheureuse ville, sur le point d’expirer. Mais la guerre survint, dispersant la société à peine formée et l’obligeant à abandonner momentanément le projet. Ce n’est que lorsque le calme fut revenu qu’il fut repris, le 23 avril 1921. C’est à cette date que fut constitué le Syndicat d’Initiatives dont vous faites partie aujourd’hui. Une réunion préparatoire eut lieu à laquelle prirent part : MM Daniel, Bargeaud Léonce, Bazin, Bruneau, de Saint-Martin, Chaillé Auguste, Bargeaud Jean, de Blandinières, Brisson, Jagou, Mabereau fils, You René, Chatelier, Riffaud, Gaudit Emile, Goulé, Levêque, Frahier et Jarno.

Le bureau fut ensuite constitué de la manière suivante :

Président : Daniel

Vice-présidents : Gobeau, de Saint-Martin

Trésorier : Bargeaud Léonce

Archiviste : Bargeaud Jean

Secrétaire : Auguste Chaillé

Secrétaire adjoint : Léon Jagou

Membres du conseil d’administration : Brisson, Bazin, de Bethmann, Chatelier, Mabereau, Dières Monplaisir.

La cotisation fut fixée à 20frs.

Le Syndicat d’Initiatives comptait donc à l’origine 23 membres actifs. Il n’avait que 460frs total des cotisations pour toute fortune, aucun espoir de subvention et comme logement, la rue. C’est avec ses maigres ressources qu’il devait faire face à toutes les obligations qui allaient s’imposer à lui. Il est indéniable aujourd’hui que le succès a dépassé les espérances, mais au prix de quels efforts, de quels dévouements et de quelle persévérance. C’est ce que la suite de mon discours va vous expliquer.

Les voies de communication

La première question à envisager était la question des voies de communication. Les unes étaient à améliorer, les autres à créer de toute pièce. On accédait à Ronce seulement par la voie ferrée Saujon-La Tremblade prolongée par un service de voiture La Tremblade- Ronce. Voyons dans quelles conditions s’effectuait ce parcours. Le train mettait pour parcourir la distance Saujon-La Tremblade, soit 20kms, une heure et demie au minimum. On raconte même que le mécanicien du train dont la femme tenait un café avec bal en face de la station de Chaillevette prolongeait ses arrêts plus longtemps qu’il n’était prescrit par le règlement, de manière non seulement à distraire les voyageurs, mais aussi à augmenter les recettes de son établissement. A l’arrivée de La Tremblade un simple landau très inconfortable et attelé d’une mauvaise carne vous recueillait et vous transportait à Ronce par la route. Inutile de dire que le retour s’effectuait dans les mêmes conditions.

Des démarches nombreuses furent faites auprès de la Compagnie des chemins de fer de l’Etat pour améliorer cet état de choses mais celle-ci répondit par la voie de son administration en faisant des objections financières, explicables à ce moment là et fit comprendre qu’en définitive, seuls les transports d’huîtres présentaient pour elle de l’intérêt. Nous comprîmes alors que nous n’obtiendrions rien de la Compagnie concernant nos demandes. Je dois dire cependant, qu’avec une exquise politesse et pour atténuer l’amertume de ce refus, on nous fit espérer que des autorails rapides pourraient être mis en circulation dans un délai assez rapproché. Ces autorails, nous les avons attendus et vous les attendrez probablement longtemps encore.

Camille Daniel,l'infatigable promoteur de Ronce entre les deux guerres
Convoi d'huîtres

Convoi d'huîtres

Le tramway de Royan.

Ce début fut donc un insuccès complet.C’est alors que nous songeâmes à nous adresser à la société des Tramways de Royan.-les lignes d’autobus n’existaient pas encore- de manière à faciliter l’accès à Ronce par Royan-La Grande Côte et La Grande Côte-Ronce- les-bains. Là encore, les négociations semblaient difficiles. Les administrateurs avaient toujours considéré que toute exploitation de leur ligne la Grande Côte-Ronce ne pouvait qu’être déficitaire et ils en avaient concédé l’exploitation à un entrepreneur qui amenait les excursionnistes jusqu’au Galon d’Or et de là, les embarquait pour l’île d’ Oléron. Une fois de plus Ronce était laissé de côté. A tout prix il fallait y remédier. Un nouvel administrateur venait d’être nommé, M. Sapin, très homme d’affaires, très audacieux, et ne reculant devant aucun progrès. Il accepta d’entrer en pourparlers, défendit âprement comme c’était un devoir, les intérêts de sa Société et l’affaire fut conclue aux conditions suivantes :

1) Mr. Daniel paierait de ses deniers la tranchée de la forêt qui aboutit sur la route de Ronce-les-Bains à La Tremblade, soit 2800frs

2) Il autoriserait le passage de la voie sur sa propriété et sur la route lui appartenant qui va de la route de La Tremblade à la route actuelle.

3) Il donnerait en pleine propriété à la Société des tramways, pour y établir la gare, 4000m² de terrain estimés 20frs le mètre.

En échange, le Tramway s’engageait à venir pendant les trois mois de saison au moins deux fois par jour. Les conditions étaient draconiennes, mais à prendre ou à laisser. Elles furent acceptées et l’acte passé devant Maître Bargeaud, notaire à La Tremblade.

Camille Daniel,l'infatigable promoteur de Ronce entre les deux guerres
Camille Daniel,l'infatigable promoteur de Ronce entre les deux guerres
Camille Daniel,l'infatigable promoteur de Ronce entre les deux guerres
28 juin 1924, inauguration de la ligne du tramway de Ronce

28 juin 1924, inauguration de la ligne du tramway de Ronce

Ce pénible succès obtenu, il restait à détruire l’accusation portée contre Ronce de n’être qu’un « cul de sac », ce qui était du reste la vérité. Une seule solution s’offrait : ouvrir un débouché par la mer, solution évidemment simpliste mais grosse de difficultés pécuniaires. Il ne pouvait être question de faire appel à la caisse du Syndicat et la plage étant extrêmement plate nécessitait pour l’accostage un appontement d’une grande longueur par conséquent d’un prix assez élevé. Il fut alors décidé qu’un appel serait fait aux membres du Syndicat pour constituer une Société anonyme qui serait absolument indépendante du Syndicat d’Initiatives. Deux cent cinquante actions furent émises et rapidement couvertes. C’est dans ces conditions que fut construit l’appontement. Le service des passagers fut assuré d’abord par un bateau pris en location, ce n’est que plus tard que la société, devant le nombre croissant des passagers, émit 350 obligations pour faire l’achat du bateau actuel. La situation financière de cette Société est actuellement assez florissante, grâce à la gestion gratuite des administrateurs, grâce aussi aux souscripteurs de la première heure, j’entends par là, des actionnaires, qui acceptèrent de ne toucher que de très rares dividendes

Embarcadère d'une longueur de 300 mètres environ

Embarcadère d'une longueur de 300 mètres environ

Camille Daniel,l'infatigable promoteur de Ronce entre les deux guerres
Camille Daniel,l'infatigable promoteur de Ronce entre les deux guerres

Pour en terminer avec les moyens de communications, il me reste à parler des routes pour la réfection desquelles le Syndicat d’Initiatives insista souvent auprès de l’administration des Ponts et Chaussées. Aujourd’hui ont été entièrement refaites les routes de Saujon-La Tremblade, de La Tremblade à Ronce, et enfin l’Avenue Gabrielle, cette dernière par la Commune.

Route de La Tremblade à Ronce

Route de La Tremblade à Ronce

Les voies d’accès étant préparées, il s’agissait maintenant de mettre un peu d’ordre dans la station afin de recevoir les touristes éventuels. A cet effet, le Syndicat d’Initiatives décida d’appointer un nettoyeur d’allées et un garde, afin d’assurer l’ordre. Quarante bancs furent placés sur les différentes avenues, ainsi qu’une balustrade le long de la place Brochard. Un projet de kiosque à musique sur la même place échoua, la Municipalité d’alors ayant contesté au Syndicat le droit de construire sur un terrain dont elle revendiquait la propriété. Ce fut là l’origine d’un premier théâtre de la Chaumière sur lequel nous reviendrons au chapitre des distractions.

 Le  jour du 14 juillet. Au second plan, la place Brocard fermée par une balustrade

Le jour du 14 juillet. Au second plan, la place Brocard fermée par une balustrade

L’Hôtellerie et les restaurants.

Mais il ne suffit pas d’attirer les touristes, il faut encore les recevoir convenablement, c'est-à-dire, avoir le nécessaire pour les loger, les nourrir et les distraire, en un mot pour leur rendre le séjour agréable. Nul n’ignore que le problème de l’hôtellerie et du tourisme, sont étroitement liés. J’aborde ici, Messieurs, le point le plus délicat de mon discours, car je suis obligé de me mettre en cause personnellement, mais ceci est nécessaire pour expliquer le développement de Ronce. Au moment où se place mon exposé, la situation hôtelière était la suivante. Le Grand-Chalet qui changeait constamment de propriétaires ne disposait que d’un nombre très restreint de chambres et présentait un état de délabrement lamentable. Le Grand-Hôtel, malgré son aspect de caserne aurait pu, à la rigueur, servir de logement provisoire, mais son propriétaire, devant les prétentions du fisc se refusait à l’ouvrir. Enfin les nombreuses pensions de familles et restaurants qui se sont ouverts depuis n’existaient pas.

Terrasse du Grand Chalet donnant sur la mer

Terrasse du Grand Chalet donnant sur la mer

Camille Daniel,l'infatigable promoteur de Ronce entre les deux guerres

C’est alors que je me décidai à faire bâtir : 1) le restaurant actuel de La Chaumière, 2) l’Hostellerie de Saintonge, 3) les magasins au nombre de 13, qui forment le rond-point de l’allée Gabrielle et de la place Brochard, 4) l’avenue appelée improprement avenue de la Chaumière, et dénommée à l’origine Boulevard de la Mer créant ainsi l’équipement que je jugeais indispensable au développement de Ronce.

Sans vouloir entrer dans les détails, je puis dire que, les magasins mis à part, cette initiative ne me causa que des déboires au point de vue financier d’abord et surtout au point de vue moral. Je n’insisterai pas d’avantage sur ce point, mais ce fut la raison dominante qui m’empêcha de poursuivre l’exécution d’un plan beaucoup plus étendu, et destiné, dans mon esprit, à donner à Ronce une extension considérable.

J’ai hâte d’en finir avec mes interventions personnelles et je vous signalerai seulement que j’ai fait bâtir la Poste actuelle et vendu à la commune de La Tremblade 3000 m² de terrain à raison de 1fr le mètre carré, à la condition express qu’il y serait bâti une école publique.

Je reviens donc avec plaisir sur le terrain syndical sur lequel je me sens, croyez-le, beaucoup plus à l’aise.

Camille Daniel,l'infatigable promoteur de Ronce entre les deux guerres
L'Hostellerie de Saintonge, avenue de Saintonge en 1939

L'Hostellerie de Saintonge, avenue de Saintonge en 1939

Autre cliché de L'Hostellerie bâtie sur la dune

Autre cliché de L'Hostellerie bâtie sur la dune

Les treize cases des nouveaux magasins

Les treize cases des nouveaux magasins

 L'école primaire ouverte en 1938

L'école primaire ouverte en 1938

Le syndicat

Le syndicat, régulièrement constitué et affilié à la fédération des Syndicats, était maintenant obligé de trouver un logement, si modeste fût-il mais en rapport avec ses ressources. Ce fut d’abord une cabane en bois construite sur un terrain appartenant à M. Valdès, touchant à la confiserie actuelle « A la marquise d’Anchoine ». Pour en diminuer le prix de location, pourtant modeste, la moitié fut sous-louée à un coiffeur qui donnait, entre deux barbes, quelques renseignements. Mais cette situation d’attente ne pouvait durer, et le Syndicat décida de se mettre dans ses meubles. La Commune voulut bien concéder sur la place Brochard, un emplacement de 5m x 4m, à la condition qu’en cas de dissolution, le terrain et la construction lui reviennent en pleine propriété.

C’est sur ce terrain que fut édifié le bâtiment actuel par les soins de Mr Mesnard, entrepreneur à La Tremblade, au prix forfaitaire de 5000frs. Le bureau possède aujourd’hui tout le matériel nécessaire, matériel qui est la propriété du Syndicat : tables, chaises, armoires, bascule médicale, téléphone (à la disposition du public), horloge publique, poste de secours. Pendant les périodes nécessaires, c'est-à-dire à Pâques et pendant les mois de juin, juillet, août et septembre, une employée, la plupart du temps assistée d’un membre du Conseil d’administration, se tient à la disposition des touristes, pour leur donner tous renseignements utiles en ce qui concerne les horaires des trains, trams, bateaux, etc… Enfin, une bibliothèque comprenant, outre le bottin, les différents opuscules qui concernent les stations de France, peut être consultée par eux.

En 1937, le Syndicat a répondu à plusieurs centaines de lettres de demandes de tous ordres. Disons aussi qu’en 1925 l’Exposition Internationale de tourisme de Grenoble lui décernait un Diplôme de Médaille d’Or, bien qu’il n’eût pas encore l’importance qu’il a aujourd’hui. Le Syndicat d’Initiatives est le centre de tous les moyens de transport et il a obtenu, cette année, que la gare des Chemins de Fer de l’Etat, dont l’administration demandait la suppression, soit non seulement maintenue, mais encore rebâtie derrière le syndicat, assurant ainsi la cohésion de tous les services en un point central.

A droite, la pâtisserie confiserie A la marquise d'Anchoine

A droite, la pâtisserie confiserie A la marquise d'Anchoine

Camille Daniel,l'infatigable promoteur de Ronce entre les deux guerres

La poste

Il faut encore reporter à l’actif du Syndicat l’histoire de la Poste. Elle vous le montrera aux prises avec l’administration des Postes et l’administration municipale. A l’origine, Ronce-les-Bains ne possédait qu’une simple cabine téléphonique, située dans un petit bâtiment à l’extrémité de l’avenue Gabrielle, bâtiment qui fut occupé pendant la guerre par des prisonniers allemands. Comme elle devenait insuffisante, le Syndicat songea à s’adresser à la commune en la personne de son Maire, afin d’avoir un logement convenable. Ce maire aujourd’hui décédé et que tout le monde reconnaitra à la franchise de son langage fit la réponse suivante : « Je m’en f…si vous voulez une poste, vous n’avez qu’à vous la payer… » Il n’y avait donc rien à espérer de ce coté. On se retourna alors vers l’administration des Postes qui fit dans une forme un peu plus courtoise, la même réponse. Je reconnus alors que le Maire avait raison. Je bâtis donc la Poste actuelle et pendant quatre ans ce fut le Syndicat qui paya :

1) les frais de loyer

2) le salaire de l’employée, et ce qui paraît encore plus extraordinaire, le Syndicat dut faire à l’Etat, l’avance des appareils nécessaires au service soit 1600frs. Cette charge énorme pour son maigre budget ne pouvait continuer à être supportée par lui. Il fit d’énergiques réclamations qui ne trouvèrent pas d’écho, la Commune et l’Administration se rejetant la balle.

Aujourd’hui la Poste de Ronce-les-Bains a 35 abonnés au Téléphone, l’Administration ne paye pas de loyer, l’employée n’a pour tout salaire que le bénéfice de ses remises, mais en revanche l’Administration perçoit le bénéfice des abonnements, celui des communications et des opérations postales et cela, sans bourse délier. Et l’on dit que l’Etat n’est pas commerçant !

La première des trois postes de Ronce qui n'en a plus

La première des trois postes de Ronce qui n'en a plus

La publicité

Abandonnons maintenant ce sujet pour aborder celui de la publicité.Nous avons publié un premier guide qui fut rapidement épuisé, puis un second qui ne tardera pas à l’être. Ces guides sont envoyés chaque année en nombre imposant à toutes les Associations de tourisme et aux principaux Syndicats d’Initiatives de France. Leur action a été incontestablement très efficace. Nous avons fait de la publicité dans les grands périodiques touristiques, le Grand Tourisme, la France Touristique, le Guide Alix, et divers autres, enfin, dans la presse locale, chaque fois que l’occasion s’est présentée. Un triptyque a figuré longtemps à la gare St-Lazare et nous sommes représentés par de très belles photographies à l’Exposition de 1937 (pavillon du Tourisme) Enfin je rangerai au point de vue publicitaire le grand banquet qui fut offert au Congrès des Syndicats d’Initiatives dans une salle privée du Grand Hôtel. Le menu ne comprenait ni viandes ni légumes mais bien toutes les espèces de coquillages qui peuvent se consommer sur la Côte d’Argent, exactement 28, tous les crustacés, de la langouste au vulgaire crabe, ainsi qu’une grande variété de poissons. Ce menu original fut très apprécié et son caractère de régionalisme intense laissa dans l’esprit des convives, un souvenir qui dure encore à l’heure actuelle. Y assistaient Mr William Bertrand, actuellement Ministre, Mr. le Préfet de la Charente, Mr le Sous-Préfet de Rochefort, l’Administrateur de la Marine, ainsi qu’un grand nombre de présidents des fédérations des Syndicats d’Initiatives de France qui, dans leurs régions respectives, parlèrent de la réception qui leur avait été faite dans des termes très chaleureux. Ainsi le nom de RONCE-LES-BAINS commença à se répandre. Il suffit maintenant de mettre dans n’importe quel bureau de Poste une lettre portant simplement la mention Ronce-les-Bains pour qu’elle arrive sûrement à destination.

Fêtes et Concerts

Nous avons parlé plus haut du refus par la commune de laisser construire un kiosque sur la place Brochard. On décida alors que ce kiosque serait bâti sur un terrain privé. L’emplacement se trouvait en face du restaurant appelé actuellement « La Chaumière » et on y donna pendant la saison un certain nombre de concerts avec l’orchestre Rampnoux auquel se joignirent quelques amateurs bénévoles.

En présence des succès obtenus, devant l’insuffisance du nombre de places et l’exiguïté de la scène, il fallut aviser. C’est alors que naquit la véritable Chaumière, derrière la Poste actuelle. Ceux qui fréquentèrent Ronce à cette époque ont encore le souvenir de ce charmant petit théâtre de style rustique, où furent représentés : opéras-comiques, comédies, et où furent données des fêtes extrêmement brillantes. Malheureusement les matériaux employés à sa construction étaient fragiles et il ne put résister à quatre hivers successifs. Il a aujourd’hui complètement disparu. C’est à l’initiative du Syndicat qu’est due la fête des Ecaillères, la joyeuse cavalcade composée de 56 femmes habillées en Saintongeaises, qui parcourut en 18 voitures automobiles le littoral de la mer, de la Grande Côte à Saint-Georges, les kermesses sur la place Brochard, etc... Enfin, toute la série de réunions ayant un caractère sportif, rallyes automobiles organisés avec le concours de l’auto-club de la Charente-Inférieure, gymkhanas automobiles, courses de lenteur pour motocyclettes, courses de vélos, courses à pied, enfin séances d’aviation. J’ajouterai qu’il a toujours subventionné les associations qui, en dehors de lui ont voulu organiser des fêtes ou compétitions quelconques. Je citerai, comme exemple, le Comité des fêtes auquel il alloue chaque année une somme de 1000frs.

Pendant quatre années,un large public a assisté aux spectacles donnés au théâtre de La Chaumière

Pendant quatre années,un large public a assisté aux spectacles donnés au théâtre de La Chaumière

La troupe des Rigolards s'est souvent produite à La Chaumière

La troupe des Rigolards s'est souvent produite à La Chaumière

La fête des Ecaillères

La fête des Ecaillères

Kermesse. Au centre on reconnaît François de Saint Martin

Kermesse. Au centre on reconnaît François de Saint Martin

Avant de terminer, Messieurs, ce long exposé, et vous avoir montré par quels efforts nous sommes arrivés au magnifique résultat que vous pouvez constater, j’ai le regret de dire que 120 membres seulement font partie du Syndicat d’Initiatives. Or, comme je l’ai dit plus haut, nous avons actuellement 504 constructions contrôlées par le service du cadastre. Il y a donc 375 propriétaires qui bénéficient de toutes les améliorations apportées par le Syndicat d’Initiatives, sans lui venir en aide personnellement ou pécuniairement. Cela paraît inadmissible et pourtant cela est. Nous pourrions les atteindre par la taxe de séjour et nous nous y sommes toujours opposés dans l’intérêt même de Ronce.

Nous n’aimons pas la coercition ; nous nous adressons seulement à leur conscience et à leur intérêt. Nous avons eu des moments difficiles et nous sommes arrivés à les surmonter grâce aux membres qui nous sont toujours restés fidèles. Qu’ils me permettent aujourd’hui de les en remercier publiquement. Parmi ceux-ci, nombreux sont ceux qui n’avaient aucun intérêt à le faire. Ils n’en ont eu que plus de mérite. Je remercie aussi les membres du Conseil d’administration pour leur attachement et pour les précieux conseils qu’ils m’ont donnés.

Liste des membres du Syndicat d’Initiatives en 1937.

Alamigeon, Audoin, Bargeaud Léonce, Boire, Bonnaud, Bély, Bargeaud Jean, Bellaygue, Bodit fils, de Blandinières, Bonnaventure Roger, Ballat, Brèthes, Bodit mère, Breuil vins, Birolleau tailleur, Coudin Albert, Cogit, Crédit de l’Ouest, Crédit commercial, Chaillon photo, Cheymol, Chagnoleau agence, Comptoir d’Escompte, Clergeau, Couquiaud Mosty, Camus, Chiron, Chagnoleau Georges, de la Debuterie, Desbordes Etienne, Deslandes, Daniel Camille, Mme Daniel, Daniel Jacques, Desbrosse, Mme Desbrosse, Dubreuil, Durand René, Docks des Charentes, Dières Monplaisir Joseph, Dandonneau, Dalidel, Enaux, Favier Henri, Mlle Favier, Fuchs Jean, Fourcade docteur, Frahier Fernand, Frahier Eole, Fortin, Fantoulier, Favier Eugène, Gaudit Emile, Mme Gaudit, Gillet, Goulé entrepreneur, Gaboriau et Grolleau, Gobeau, Guériteau, Guyon charcutier, Gouraud, Goulé fils, Haumier, Hérault, Mme Hérault, Mme Vve Hérault, Ingrand Louis, Jagou, Jouhaneau, Mlle Yung, Karoleiwicz, Lopez, Lavarda, Loreau, Lécuroux, de Luze, Louis Emile, Louis Gaston, Laval, Marsat, Maisonneuve, Mennerat, Monin, Mallet père, Marquette Paul, Mallet mère, Mandon, Mlle Maurisset, Mr Moreau Royan, Morel Saint-Georges, Marquet, Nadaud Dagand, Pompignac, Piochaud, Phelipeau André, Pistre, Pinard Jules, Pierre épicier, Proust, Prignaud, Plomelle, Photo Jane, Rietman, Renaud Jasmin, Rideau, Rouquette, Rousseau, Rzewuska, Rollier, Mme Rouquette, Royer, Rajaud, Soubise, Steyger Emile, Séchère, Tallieu, Thévenin Chaux, Turpeau boulanger, Touchard, Troubat, Vaurigaud, Vincent, Mr et Mme You Maurice, Yvon.

Je termine, Messieurs, ce long exposé qui relate les événements tels qu’ils se sont passés dans la période qui s’est écoulée de 1921 à 1937. Ronce deviendra peut-être une grande ville et la lecture de ces documents permettra d’en connaître exactement les origines et c’est là, Messieurs, le but de mon discours.

C. DANIEL

Président du Syndicat d’initiatives

NB – Au cours de l’exposé ci-dessus, j’ai peut-être un peu insisté sur le peu d’assistance que le Syndicat d’Initiatives avait reçu de La Tremblade, ce fut exact au début, mais depuis, la situation s’est heureusement modifiée. La subvention qu’elle accordait au Syndicat d’ Initiatives est passée de 0 à 500, 500 à 1000 et 1000 à 1500frs.

C’est à la commune que nous devons la réfection de l’allée Gabrielle, l’eau et l’électricité. Enfin elle a voté les crédits nécessaires pour la construction de l’école publique, qui est actuellement commencée et entrera en fonction en 1938. Il convient donc de la remercier pour ces améliorations qui ont une importance capitale pour l’ avenir de Ronce-les-Bains.

Le nouveau syndicat, été 1979

Le bâtiment abritant le Syndicat d’initiatives, devenu inapproprié et menaçant ruine, on décida de le restaurer. Voici le jugement porté par le correspondant de presse Michel Grelon sur sa remise en état : « Les commentaires n’en finissent pas sur cette initiative jugée généralement peu heureuse qui a consisté à plaquer une façade de décor sur l’ancien chalet du syndicat. Certains comparent l’ensemble à un saloon d’un mauvais western, d’autres lui trouvent un relent de glace à la pistache victime des grosses chaleurs de ces derniers jours. Seuls sont vraiment satisfaits les puristes de l’orthographe qui voient disparaître un S fautif depuis l’origine puisque la règle veut qu’un syndicat n’ait qu’une initiative.

Si l’agréable est difficile à déceler, du moins reste-t-il l’utile. A cet égard le syndicat d’initiative de Ronce, que l’on trouve sa nouvelle mise laide ou belle, joue bien son rôle. Informations fournies par l’hôtesse, renseignements inscrits sur les tableaux extérieurs et renouvelés chaque jour, dépliants et prospectus, sont appréciés des nouveaux venus. »

Le Syndicat d'initiative relooké

Le Syndicat d'initiative relooké

Cette réfection du Syndicat d’initiative montre rapidement ses limites. Une décennie plus tard, force est de constater qu’il faut le raser et construire en lieu et place un bâtiment en dur digne de ce nom pour accueillir des touristes de plus en plus nombreux. C’est l’édifice actuel qui date d’une vingtaine d’années. Le Syndicat d’initiative est devenu par décision préfectorale un Office de Touriste Syndicat d’Initiative, « O.T.S.I » administré par des professionnels.

Une page se tourne  après 70 ans de bons et loyaux services

Une page se tourne après 70 ans de bons et loyaux services

Le nouvel Office de tourisme bâti au début des années 90

Le nouvel Office de tourisme bâti au début des années 90

L'office de tourisme en 2014

L'office de tourisme en 2014

Il est bien loin le temps où le docteur Brochard, l’un des premiers à contribuer à l’essor de Ronce d’une façon significative, avait, dans les années 1880, émis l’idée pour fédérer les énergies de créer une espèce d’association nommée Compagnie d’initiatives qui, en 1894, s’appela Sociétés d’initiatives. Celle-ci jeta les bases de la naissance du Syndicat d’initiatives voulu par Camille Daniel et une vingtaine de personnes le 23 avril 1921. Brochard l’a rêvé, Daniel l’a fait

Le docteur Brochard a obtenu très tôt la notoriété si bien que la place la plus emblématique de Ronce porte son nom. Mais il fallut attendre de nombreuses années pour reconnaître les mérites de Camille Daniel et pour qu’une partie de l’avenue de la Chaumière soit rebaptisée pour porter le sien.

Ce tronçon de l'avenue de la Chaumière s'appelle désormais avenue Camille Daniel

Ce tronçon de l'avenue de la Chaumière s'appelle désormais avenue Camille Daniel

Ce dernier résonne désormais sur une avenue, certes des plus courtes - de la place Brochard aux feux tricolores-mais des plus fréquentées.

Avec le docteur Brochard pour initiateur et Camille Daniel pour concepteur, Ronce-les Bains peut s’enorgueillir d’avoir eu, à des périodes différentes, des hommes d’exception à son service.

Daniel Chaduteau

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commentaires

L
allée
Répondre
L
merci ,toujours grand plaisir à relire tout cela.J'ai 80 ans demain et j'ai connu grande partie des transformations.J'habitais allé de l'aunis et j'ai bien connu la premiere poste (très petit j'arrivais juste à la boite à lettres!!!!!!!!!!
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C
C'est avec beaucoup d'intérêt que je viens de lire cet article. Le nom de Camille Daniel m'était inconnu, tout comme les étapes si laborieuses de la naissance de Ronce les Bains.<br /> Bravo Dany d'avoir fait sortir de l'ombre cet homme persévérant!
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